Le mythe de l'Anneau de Gygès
Il était une fois un berger au service d'un roi ; au cours d'un violent orage accompagné d'un séisme, la terre se fendit et une ouverture béante apparut près de l'endroit où il faisait paître ses troupeaux. Voyant l'abîme et s'émerveillant, il descendit et vit, parmi bien d'autres merveilles, un cheval d'airain, creux, avec des ouvertures, à travers lesquelles, en se penchant, il aperçut un cadavre qui paraissait plus grand que celui d'un homme, et qui ne portait rien d'autre que, à la main, un anneau d'or, qu'il lui déroba. Et il s'en fut. Lorsqu'arriva le jour de la réunion des bergers, en vue d'aller faire au roi le rapport mensuel sur l'état des troupeaux, il y vint portant cet anneau au doigt. Alors qu'il était assis au milieu des autres, il lui arriva par hasard de tourner la bague autour de son doigt, vers l'intérieur de sa main. Il devint soudain invisible à ceux qui étaient assis avec lui, et ils parlaient de lui comme s'il était parti. Et lui de s'émerveiller et, manipulant de nouveau à tâtons l'anneau, il le tourna vers l'extérieur et, en le tournant, redevint ainsi visible. Réfléchissant à l'expérience après la réunion, il refit l'essai avec l'anneau pour voir s'il avait bien ce pouvoir et en arriva à la conclusion qu'en tournant la bague vers l'intérieur, il devenait invisible, vers l'extérieur, visible. Fort de cette découverte, il fit aussitôt en sorte de devenir l'un des messagers auprès du roi et, sitôt arrivé, ayant séduit sa femme, il s'appliqua avec elle à tuer le roi et prit ainsi le pouvoir. L'invisibilité lui ouvrit bien des aisances pour réaliser son forfait.
Ainsi donc, on peut conclure de cette histoire que si on donnait l'invisibilité à un homme juste, il ne resterait pas fidèle à la justice. Il ne pourrait s'empêcher de voler, de faire au gré de ses désirs. Invisible, le juste aurait toutes les ressemblances d'un homme injuste.
La justice n'est donc pas un choix individuel mais une obligation donnée par un groupe. Tous les hommes pensent en réalité que l'injustice est beaucoup plus avantageuse que la justice. Ceux qui penseraient le contraire seraient considérés par les autres comme les plus malheureux et les plus ridicules des hommes»
(texte tiré de Platon, République, livre III et adapté)
Question de départ ? Qu'auriez-vous fait à la place du berger, si vous aviez le pouvoir de devenir invisible ? Pourquoi ne le faites-vous pas en étant visible ?
Questions de relance : Rapport justice/punition : L'impunité est-elle la source de l'injustice ? Le risque de la punition est-elle la principale raison d'être juste/de respecter la loi ? Rapport entre visibilité et morale : Le fait d'être regardé change-il votre comportement ? En quoi et pourquoi ? Le fait de ne pas être vu change-t-il parfois votre comportement ? Comment ? Pourquoi ? Est-ce intéressant d'être juste si on paraît injuste ? Que faites-vous seulement parce qu'on vous regarde ? Que faites-vous seulement parce qu'on ne vous regarde pas ? Rapport justice/bonheur Peut-on être injuste et pourtant heureux ? Peut-on être toujours juste et pourtant malheureux ? L'injustice rend-elle plus heureux que la justice ? L'injustice est-elle plus avantageuse que la justice ? Rapport entre pouvoir et justice Pour parvenir au pouvoir, faut-il être injuste ? Pour exercer le pouvoir, faut-il être juste ? Pour exercer le pouvoir, faut-il paraître juste ? Rapport entre être et paraître juste Vaut-il mieux être juste ou paraître juste ? Peut-on parfois être injuste et paraître juste ? Peut-on parfois être juste et paraître juste ?
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire