Accéder au contenu principal

Mediathèque Noé 15 avril 2023 - Peut-on vivre sans Dieu ?

Séance Hybride pour se connecter en Vidéo allez sur le site https://meet.jit.si/ et taper le mot clé CludDiscussion (attention le C et le D sons en majuscule) dans l'espace de saisie puis cliquer sur le bouton Démarrer la conférence. Et en physique à la Médiathèque de Noé

Ma grand-mère animée par la "foi du charbonnier", avec qui je m'interrogeais, il y a 30 ans sur la nécessité de donner une éduction religieuse à mon fils qui venait de naître, me déclara : " Ce qui est important c'est la crainte de Dieu!". 
Cela signifiait simplement que la peur du regard de Dieu devait diriger vos actions. Ce regard qui était pour elle, la garantie conscience en éveil. Comme l'élève travaillant avec application sous les yeux d'un maître craint, aimé, secret et cela pour des raisons inexplicables et acceptées ...  
Mais si pour beaucoup "Dieu est mort", comment peut-on ? 


Au cas où elle réussirait, la psychanalyse fournirait-elle la preuve qu’il est possible de se passer du Nom-du-Père, si on s’en sert ? S’en servir, de ce signifiant, ferait condition pour pouvoir s’en passer. S’en passer… « aussi bien » dit Lacan en avril 1976. Ce qui veut dire qu’on peut ne pas s’en passer, mais… « aussi bien », qu’on peut s’en passer, si toutefois on parvient à s’en servir. Objection : mais si on s’en sert, des services attribués à ce signifiant, ça veut dire qu’on ne s’en passe pas ! Eh bien justement non ! Il y aurait un savoir s’en servir qui permettrait qu’on s’en passe. Mais on se sert de quoi ? On se sert d’une pure fonction logique, celle assignée par la théorie psychanalytique à ce signifiant. Et on se passe de quoi ? On apprend à se passer de l’imaginaire qui tourne autour du nom qu’a reçu cette fonction, qui est le nom hérité à la fois de la tradition judéo-chrétienne, de la tradition patriarcale et du mythe fabriqué par Freud dans Totem et tabou....

Grands Dossiers N° 10 - Mars-avril-mai 2008

Article mis à jour le 

Quand certains défendent aujourd'hui qu'une société ne peut se passer de religion, des philosophes prennent la plume pour se faire les avocats d'un projet athée. Un projet qui mobiliserait laïcité, morale et spiritualité… et écarterait Dieu.
Athée est un terme étymologiquement négatif. Il vient du grec, et se divise en a- (sans) et theos (dieu). Un athée est donc un sans-dieu. Un type qui se prive de transcendance divine et de tout ce qui est censé aller avec, compassion, spiritualité… Pour peu que l’on accorde crédit à l’hypothèse qui fait de la religion la source de la morale, du vivre-ensemble. Cette perspective acquiert aujourd’hui un certain relief médiatique avec la vulgate répétée d’un retour mondial du religieux, avec l’engagement public d’hommes politiques occidentaux (1), avec enfin une tentation croissante de calquer une explication monocausale sur les multiples conflits du moment, recourant pour ce faire à la seule grille des oppositions religieuses. Julia Kristeva parle ainsi de notre époque comme de « sombres temps où la certitude nihiliste des uns croise l’exaltation fondamentaliste des autres (2) ». Doit-on pour autant penser que le monde se résume à un conflit permanent entre groupes religieux, qui ne reconnaîtraient comme ennemis communs qu’une poignée d’athées nihilistes ?
Vitupérant cette lecture manichéenne de l’actualité, deux philosophes français ont pris la plume, se revendiquant d’une thèse qui, en d’autres temps, aurait frôlé l’hérésie : on peut être athée et tolérant, la foi n’est pas l’essence même du vivre-ensemble, les religions n’ont pas le monopole de la morale. Bref, le xxie siècle sera laïque ou ne sera pas. L’Esprit de l’athéisme d’André Comte-Sponville (3) et le Traité d’athéologie de Michel Onfray (4) ont connu un beau succès d’édition. Que trouve-t-on dans ces deux essais ?

Une sagesse pour notre temps

Appelons le premier avocat de l’athéisme à la barre : A. Comte-Sponville, né en 1952. Son ambition affichée est de renouer avec l’idéal ancien de sagesse, tout en assumant les défis de la modernité tels qu’on les voit apparaître chez Friedrich Nietzsche, Karl Marx et Sigmund Freud.

Cela implique d’élaborer une métaphysique matérialiste, une éthique humaniste et une spiritualité sans Dieu, l’addition de ces trois prémisses aboutissant à construire « une sagesse pour notre temps ». Bref, un programme d’envergure, qui ne vise rien de moins qu’à faire de l’athéisme une valeur d’avenir. Pour A. Comte-Sponville, un athée peut bien évidemment faire siennes les valeurs judéo-chrétiennes (ne pas tuer, ne pas voler, ne pas convoiter l’épouse du voisin…). La morale n’est pas un monopole du religieux. Certains disent que l’on ne peut se conduire correctement que si l’on croit que Dieu compte les écarts et les sanctionne post mortem. Rien de plus faux, s’insurge notre philosophe. Croire en Dieu n’a jamais empêché un fanatique de transgresser des valeurs supérieures. L’histoire nous montre avec constance que le meurtre au nom de Dieu est un phénomène universel. Ce qui fait la morale, c’est un choix conscient. Et l’humaniste, libéré du regard de Dieu, peut décider en conscience d’être moral.

Second avocat : Michel Onfray, médiatiquement consacré, répétitivement dénoncé aussi pour son réquisitoire sans concession contre tout ce qui porte soutane, kippa ou voile. Bah, qu’importe ! L’auteur signe un pamphlet, le genre s’accompagne obligatoirement d’effets de manche outranciers. Le texte figurant en quatrième de couverture de son ouvrage résume à lui seul l’intention du livre : « Les trois monothéismes, animés par une même pulsion de mort généalogique, partagent une série de mépris identiques : haine de la raison et de l’intelligence ; haine de la liberté ; haine de tous les livres au nom d’un seul ; haine de la vie ; haine de la sexualité, des femmes et du plaisir ; haine du féminin ; haine des corps, des désirs, des pulsions. En lieu et place de tout cela, judaïsme, christianisme et islam défendent : la loi et la croyance, l’obéissance et la soumission, le goût de la mort et la passion de l’au-delà, l’ange asexué et la chasteté, la virginité et la fidélité monogamique, l’épouse et la mère, l’âme et l’esprit. Autant dire la vie crucifiée et le néant célébré. » Rien de moins.

Déconstruire le religieux

L’athéologie se présente donc comme une science de la déconstruction du religieux, une discipline qui suppose « la mobilisation de domaines multiples » : psychologie et psychanalyse pour « envisager les mécanismes de la fonction fabulatrice » ; archéologie pour mettre les livres saints à l’épreuve du témoignage factuel ; linguistique, histoire, etc. Et philosophie pour coordonner l’entreprise, avec en ligne d’horizon l’avènement d’« une physique de la métaphysique, donc une réelle théorie de l’immanence, une ontologie matérialiste ».

M. Onfray multiplie les exemples piochés dans l’histoire des religions – et donc les risques de se faire anathémiser – afin de faire de son argumentaire un acte d’accusation valant condamnation à mort. Son discours, très documenté, ne comporte que très peu d’erreurs factuelles. Il n’est pas faux, il est juste orienté. Il souligne méthodiquement la face obscure des religions, les contradictions qui émaillent Bibles et Coran, et s’abstient avec constance d’évoquer les lumières d’une Andalousie de la tolérance, d’un Maïmonide, d’un Ibn al-Muqaffa’ (5) ou d’un Matteo Ricci.

Ceci dit, rien de tout cela n’a d’importance. Comme tout essai, ces deux ouvrages valent en fait davantage par leur objectif que par les arguties qui y sont développées. Et cet objectif est d’ouvrir une réflexion que l’on pourrait résumer par : « Que serait une spiritualité – ou une ontologie – athée ? » On pourrait dire que M. Onfray commence le travail en déconstruisant, sur une base qui mêle histoire et actualités, les discours qui veulent obstinément faire rimer religion avec morale, compassion, etc. ; et que A. Comte-Sponville le prolonge en éreintant philosophiquement ces mêmes présupposés. Il entreprend ainsi de démontrer l’inanité de la preuve ontologique attribuée à saint Anselme (xie siècle), qui veut que Dieu, par définition, soit parfait, et que sa perfection ne puisse se concevoir sans existence. Puis il s’attaque à la preuve cosmologique, dont Gottfried Leibniz s’est fait l’écho, qui postule que puisque le monde est, il lui faut une cause, et que cette cause ne peut être que Dieu. Mais tout fait a-t-il nécessairement une cause ? Et de passer en revue les autres arguments en faveur de l’existence de Dieu, les réduisant en poudre en les passant au crible du raisonnement.

Affranchir la raison de la foi

Au final, A. Comte-Sponville entreprend de dresser les grandes lignes d’une spiritualité athée. L’extase, par exemple, ce fameux sentiment océanique, peut se vivre en dehors de toute croyance. La spiritualité, la réflexion sur l’infini, toutes ces choses ne sauraient être monopoles des croyants… Certes. Mais l’exercice montre vite ses limites. La spiritualité se vit davantage qu’elle ne se conçoit sur le papier. À cette aune-là, A. Comte-Sponville prêche davantage pour les convaincus que pour les sceptiques.

Nos deux plaideurs de l’athéisme sont les héritiers d’une longue histoire. La question de l’athéisme semble inscrite dans l’essence même d’une pensée philosophique qui, dès l’Antiquité grecque, entend explorer les causes de notre existence. Démocrite, qui entendait limiter les certitudes au monde observable, Anaximandre, qui avait essayé de comprendre l’univers par l’observation et non par le recours aux mythes, ou Socrate, qui pensait que l’homme pouvait de lui-même accoucher de la vérité, avaient déjà pavé la voie aux futurs libres-penseurs. Au xive siècle, à une époque où le terme d’athée renvoie à ce qui n’est pas chrétien (en d’autres termes, à tous ceux, hérétiques, mahométans…, qui n’adhèrent pas à l’Église), Guillaume d’Ockham va distinguer le temporel du spirituel, et affranchir la raison de la foi. Contre Thomas d’Aquin qui entend subordonner la raison à la foi, Guillaume d’Ockham plaide que la philosophie, dans sa recherche des causes, ne saurait en aucun cas être la « servante » de la théologie : il n’y a aucun rapport entre ces deux disciplines. Ce moine franciscain, dans lequel il serait bien prématuré de vénérer un précurseur de l’athéisme, ouvre néanmoins d’un coup de rasoir (6) une large brèche dans laquelle s’engouffreront ceux qui instaureront ultérieurement le règne de la science et de l’humanisme.

Le coup de Jarnac de Darwin

La saga est connue. Elle est scandée entre autres par les grands noms des « martyrs » de la liberté de penser. Copernic, qui murmure que le Soleil ne tourne pas autour de la Terre. Giordano Bruno, qui hurle jusqu’au bûcher que l’univers est infini. Galilée, qui défend et démontre les hypothèses coperniciennes avant de se rétracter. L’épopée de la libre-pensée, dont se réclament certains athées d’aujourd’hui, se confond avec la marche du savoir positif, qui cherche à s’affranchir du carcan de l’Église ; avec la volonté de penser librement, qui s’incarne aussi dans un Spinoza ou un Montaigne… À la différence d’un abbé Meslier qui, dès le xviiie siècle, dénonce la fausseté des religions, ces gens-là ne sont pas athées au sens propre du terme. Leur univers mental reste d’une façon ou d’une autre teinté de sacré. Mais ils élaborent cette pensée qui fera perdre à l’Église le contrôle qu’elle exerçait sur la société. L’imprécateur qu’est M. Onfray, au passage, vitupère les « déistes » que sont Denis Diderot ou Voltaire, qu’il accuse avec d’autres d’avoir été les fossoyeurs de l’œuvre des « véritables athées » qu’étaient l’abbé Meslier, le baron d’Holbach ou Ludwig Feuerbach.

Puis vient le prophète aujourd’hui adulé par les athées, Nietzsche, dont on souligne à l’envi qu’il a proclamé (prématurément ?) la mort de Dieu. Les écrits de Marx abolissent quant à eux l’idée qu’une société ou qu’une histoire ne peuvent être que religieuses. Charles Darwin, avec sa théorie de l’évolution, porte un coup de Jarnac aux tenants d’une lecture littérale de la Bible. De grands esprits scientifiques, de Paul Broca à Marcelin Berthelot, se convertissent à l’athéisme.

Aujourd’hui, se dire athée peut se vivre de deux façons. Cela peut relever d’un acte militant, qui revendique un monopole sur les Lumières, qui fait rimer sa lutte avec défense de la laïcité, et qui fait de la raison le revers obligé de l’obscurantisme religieux. Ces athées-là, libres-penseurs, se voient comme les hérauts de la modernité et portent aux nues M. Onfray. Plus discrets, peut-être plus nombreux, les athées moins impliqués trouveront quant à eux chez A. Comte-Sponville les arguments qui leur permettront de justifier ce scandaleux « mais comment peut-on être athée ? ». Mais une fois la messe dite, il faut reconnaître que la spiritualité athée, si une telle chose est possible, reste à construire. Les athées des deux catégories communieront de toute façon en entendant M. Onfray conclure : « Le travail reste à faire. Et il est planétaire. » 

A lire : 

https://www.famillechretienne.fr/foi-chretienne/fondamentaux-de-la-foi/l-homme-peut-il-vivre-sans-dieu-279818


Posts les plus consultés de ce blog

College 6/05/2024 - Qui veut, peut ?

Quand on veut, on peut ?  Est-ce vrai, si ce n'est pas vrai alors pourquoi le dit on ? Il n’y a pas d’expérience plus commune que de vouloir vraiment quelque chose sans toutefois l’obtenir. Alors, que cache vraiment cette expression, "quand on veut, on peut" ou encore " il faut se donner les moyens" ? Pourquoi, quand on veut, on ne peut finalement pas réussir notre action ? L'expression "quand on veut, on peut" signifie d'une manière à peine voilée, que vous ne voulez pas vraiment réussir. Et tout est dans ce "vraiment" ! Comme si c'était une simple question de volonté… C’est aussi une manière de vous dire que si vous fournissiez des efforts, eh bien ils s’avèreraient payants. C’est donc comme si, de la volonté, découlaient forcément les efforts, et des efforts les résultats. En fait, derrière cette formule, se cache l’idée que le travail paie nécessairement, et donc que celles et ceux qui réussissent le méritent car il suffit de ...

Lycée - 14 mai 2024 - Peut-on lancer un nain qui le veut bien ?

L’affaire dite du lancer de nain Le Maire de Morsang-sur -Orge avait interdit sur sa commune une attraction foraine dite "du lancer de nain". L’arrêté municipal avait été attaqué devant le TA de Versailles qui en avait ordonné l’annulation. Saisi par un pourvoi, le Conseil d’Etat annule ce jugement en insérant la dignité de la personne humaine à la liste des "principes généraux du droit" qui autorisent par décret ou arrêté les autorités publiques à prendre telle ou telle décision fondée non sur une loi (inexistante) mais sur l’un de ces principes dégagés par la jurisprudence administrative ou constitutionnelle. Le paradoxe de cette affaire est le suivant : le nain était parfaitement consentant et c’est sa dignité qu’il mettait en avant à l’appui de sa requête contre l’arrêté municipal : selon lui, ce travail lui avait redonné sa dignité (avant il vivait du RMI). Or, le Conseil d’État ne lui a pas donné raison : à la dignité invoquée par le nain, il a été opposé la d...

Poutine pourrait-il avoir raison ? Serions nous décadents ? Médiathèque 28 Septembre 2024

  S'interroger sur la notion de décadence, nous semble une nécessité. La décadence est un mot peu usité et son sens est le plus souvent lié à l'usage "historique" du mot dans ce qui supposé être la chute de l'empire romain. De manière plus religieuse ou cinématographique c'est la référence à Sodome et Gomorrhe qui est activée. La définition de la décadence donnée par le dictionnaire Larousse est celle-ci : 1. État d'une civilisation, d'une culture, d'une entreprise, etc., qui perd progressivement de sa force et de sa qualité ; commencement de la chute, de la dégradation : Entrer en décadence. 2. Période historique correspondant au déclin politique d'une civilisation. Ce que nous dirait Poutine, c’est donc que notre civilisation occidentale est finissante. Nous pourrions lui objecter que les difficultés qu’il rencontre pour « achever la bête », semble bien prouver le contraire. Pourtant, sa parole raisonne dans les médias et elle nous trouble et...